Bien nourrir son cheval : le guide pratique

Pour nourrir correctement son cheval, il est d’abord fondamental de comprendre sa physiologie digestive.
Le cheval est un herbivore strict, qui passe entre 14 et 18h par jour à s’alimenter. Avoir un accès ad libitum au fourrage ou à l’herbe est un point essentiel tant pour leur bien être mental que pour leur santé digestive. En effet, les chevaux ont la particularité d’avoir un estomac relativement petit proportionnellement à leur taille, et ils doivent ingérer des petites quantités de nourriture mais de manière fréquente.
Autre particularité, l’estomac produit de l’acide chlorhydrique de manière continue, à l’inverse de l’homme pour lequel la production d’acide est déclenchée par l’ingestion des repas.

Si le cheval est rationné ou que son estomac reste vide plus de 2 heures, l’acidité va commencer à attaquer la muqueuse gastrique qui sera exposée et vulnérable, et le cheval peut développer ensuite des ulcères gastriques.

La nature étant bien faite, la salive contient des bicarbonates ayant un effet tampon sur l’acidité, et un cheval peut produire jusque 60 Litres de salive par jour !

Plus l’aliment est fibreux, plus la production de salive est stimulée et plus l’estomac du cheval sera protégé.

De la quantité, de la qualité et un équilibre

Bien nourrir son cheval c’est avant tout lui apporter une alimentation de qualité. Le fourrage étant sa principale source d’alimentation et ce qui lui permet de produire de l’énergie, il est fondamental de choisir un foin non poussiéreux et sans moisissure. Le foin doit avoir une odeur agréable, et la longueur des fibres vous renseigne sur le moment de la récolte.

Pour des chevaux avec des pathologies particulières, type obésité ou syndrome métabolique, on va plutôt rechercher un foin « pauvre » en énergie et en sucres solubles, de façon à pouvoir apporter une quantité satisfaisante de matière sèche au cheval, sans le frustrer, tout en apportant peu d’énergie.

L’analyse chimique du foin est un outil précieux, on est parfois surpris des résultats obtenus et comme le cheval consomme de grande quantité de foin, une petite différence en matière de composition peut changer beaucoup de choses sur l’équilibre de la ration finale.

Notion d’apport journalier en matière sèche

L’apport quotidien en matière sèche pour un cheval doit représenter au minimum 2% de son poids vif.

Pour un cheval de 500 kg, c’est minimum 10 kg de matière sèche.

Attention, la matière sèche correspond au poids de l’aliment une fois que l’on retire l’eau qu’il contient.

Exemple dans le tableau ci-dessous :

 

Aliment Taux de matière sèche Correspondance matière brute / matière sèche (MS) Besoin quotidien pour un cheval de 500 kg : 2% PV en MS = 10 kg de MS
Herbe 15-20% 1 kg d’herbe => 0.15 à 0.2 kg de matière sèche 50 kilos d’herbe / jour = 10 kg de MS
Foin 88% 1kg de foin => 0.8kg de matière sèche 12.5 kg de foin / jour minimum = 10 kg de MS
 

Orge

88% 1kg d’orge entier =

*0.8 kg de matière sèche

*0.52 kg d’amidon (52%)

 

 

 

Le ratio fourrage / céréales doit toujours être supérieur à 1

 

l’idéal étant un ratio de 2 minimum è 2 fois plus de fourrage que de céréales dans la ration

 

Avoine

89% 1kg d’avoine entier =

*0.8 kg de matière sèche

* 0.360 kg d’amidon (36%)

 

 

Maïs

88% 1kg de maïs entier =

*0.8 kg de matière sèche

* 0.620 kg d’amidon (62%) / (71%) pour maïs floconné

 

 

Energie et protéines chez le cheval : UFC et MADC, qu’est-ce c’est ?

Pour les chevaux, on quantifie l’énergie apportée par les aliments en UFC (unité fourragère cheval), c’est un peu l’équivalent des calories en nutrition humaine. 1 UFC correspond à l’énergie apportée par 1kg d’orge brut.

L’apport protéique est appelé MADC (matière azotée digestible cheval).

Lorsque l’on établit la ration d’un cheval, on commence toujours par vérifier que les besoins en énergie sont couverts = apports suffisants en UFC.

Ce besoin dépend de l’âge, du sexe, de l’activité du cheval et de son statut physiologique (étalon, poulinière gestante ou allaitante, poulain en croissance, etc…)

Ensuite, il convient de regarder que l’apport en MADC est suffisant. Comme pour l’énergie, ce besoin dépend de plusieurs paramètres.

Enfin, il faut vérifier l’équilibre énergie-protéine, appelé ratio UFC/MADC.

Par exemple, pour un cheval au travail ce ratio UFC/MADC doit se situer entre 90 et 120.

Aliment UFC / kg de matière brute (MB) MADC / kg de MB

 

Herbe 0.14 18
Foin 0.45-0.55 40-120 (selon le type de prairie, les légumineuses étant bcp + riche en protéines)
Paille 0.25 = pauvre en énergie 90 en moyenne
 

Orge

Entier 1 83
Aplati 0.99 83
Germé 0.17 28
 

Avoine

Entier 0.86 86
Aplati 0.87 86
Floconné 1.01 91
 

Maïs

Entier 1.10 65
Concassé 1.10 65
floconné 1.11 57

Les céréales chez le cheval, c’est pas génial …

Les chevaux ne sont pas équipés pour digérer de grandes quantités d’amidon, qui est le principal constituant des céréales.

Au-delà de 200g d’amidon pour 100 kg de poids vif, l’excédent ne sera pas digéré par l’intestin grêle du cheval et arrivera directement dans le gros intestin et le caecum.

Là, il sera digéré par certaines populations de bactéries qui produiront de grandes quantités d’acide lactique, ce qui peut conduire à une destruction de la flore cellulolytique, celle qui permet la digestion des fibres et qui est fondamentale au fonctionnement digestif des chevaux.

> C’est ce que l’on appelle « dérive de flore » ou dysbiose.

D’autre part, cette acidité et cette dérive de flore provoque aussi des lésions et peut engendrer l’apparition d’ulcères au niveau du colon, à l’origine notamment de diarrhées, de crottins nauséabonds, voire de colique si les douleurs abdominales sont importantes.

La plupart des chevaux pourraient se passer de concentrés et de céréales, si l’apport de fourrage est suffisant et de bonne qualité.

Il est fondamental de surveiller le ratio Fourrage/concentrés pour limiter les troubles digestifs.

impact-cereale-cheval

Impact de la gestion humaine sur le microbiote du cheval. A gauche, cheval « sauvage » à droite cheval domestiqué, avec une flore différente et plus pauvre. Source : Kauter & al, 2019

L’huile : un vrai atout pour bien nourrir son cheval

A l’inverse des céréales et contrairement à de nombreuses croyances, les chevaux sont les champions pour digérer les lipides, ils ont un équipement enzymatique parfaitement adapté et savent comment tirer le meilleur des matières grasses.

L’huile apporte un concentré d’énergie, dans un faible volume.

Par exemple 300 mL d’huile apporte la même quantité d’énergie qu’un kilo d’orge, l’amidon et le sucre en moins, donc sans les effets néfastes des céréales !

Privilégiez des huiles de qualité, riches en oméga 3, comme l’huile de lin ou de colza. L’huile de Maïs apporterait une protection supplémentaire contre les ulcères gastriques d’après certaines études.

Les CMV pour chevaux, pour rééquilibrer la ration et compenser d’éventuelles carences.

Pour bien nourrir son cheval, évitez de faire les choses « à peu près ». Vouloir à tout prix rajouter plusieurs compléments en espérant compenser toutes les carences, est une fausse bonne idée et peut conduire à l’inverse à des excès plutôt néfastes.

Par exemple, l’excès de calcium chez le cheval bloque l’assimilation de l’iode, du zinc, du cuivre et du sélénium. Or le zinc commande la libération de vitamine A par le foie, cette dernière stimule l’activité de la thyroïde et participe à la synthèse de la trame protéique de l’os.

En cas d’excès de calcium dans la ration du cheval en croissance, l’os s’épaissit et devient plus dense, conduisant à des lésions d’ostéopathie hypertrophiques (appelées également « osteopétrose », à ne pas confondre avec ostéoporose qui est tout l’inverse), conduisant à l’apparition de suros internes capables de provoquer des compressions de la moelle épinière et de certains nerfs (exemple du syndrome de wobbler).

A l’inverse un déficit en calcium, engendre un défaut de minéralisation osseuse, des os fragiles, moins denses.

Le calcium et le phosphore chez le cheval

Un des éléments fondamentaux à regarder concerne le ratio phosphocalcique, qui correspond à la proportion relative en calcium et en phosphore dans la ration du cheval.

Le ratio Ca/P doit idéalement se rapprocher de 2, avec des variations en fonction de l’âge du cheval, de son activité ou de son statut physiologique (gestation, lactation), mais c’est déjà un bon point de repère.

Le Zinc et le Cuivre

Le ratio Zinc/cuivre, lui doit être situé entre 3 et 5. Ces deux oligoéléments présentent également une importance majeure. Ils participent à la résistance et au développement de l’os du cheval.

Les carences en cuivre sont des facteurs majeurs de développement d’ostéochondrose. Le manque de cuivre empêche la vascularisation du cartilage et l’apport de substances nécessaires à son ossification. De ce fait, le cartilage du cheval s’épaissit, se fragilise et cela aboutit à sa fragmentation. Les excès de calcium et de zinc aggravent ce déficit en empêchant son assimilation.

Le zinc joue également un rôle important dans l’immunité du cheval, la fertilité et contribue à un pelage de qualité.
 

Conclusion : ce qu’il faut retenir

LIMITER LES CÉRÉALES / AJOUT D’HUILE

FOURRAGE À VOLONTÉ
2% DU PV EN MS

VÉRIFIER L’ÉQUILIBRE :
UFC, MADC, MINÉRAUX

BASES POUR BIEN NOURRIR SON CHEVAL 🙂

Bien nourrir son cheval c’est avant tout une question d’équilibre qui doit permettre de répondre à ses besoins physiologiques. Faites vous accompagner par votre vétérinaire, il pourra vous accompagner et vous orienter vers la réalisation de bilans nutritionnels.

S.Pradeaud

La sélection de CMV conseillés par notre vétérinaire