Le harper australien chez le cheval

Le harper australien est une affection d’origine toxique dont les mécanismes ne sont pas totalement éclaircis à l’heure d’aujourd’hui. Jusqu’en 2003, la France n’avait connu que quelques rares cas de cette affection. C’est suite à la canicule subie cet été-là que de nouveaux cas sont apparus. Il n’existe pas réellement de traitement médicamenteux, la prévention et la gestion de l’environnement sont essentielles.

On remarque un nombre plus important de cas dans les prairies fraîchement semées et sur des sols riches.

Les symptômes du harper australien

Deux formes de harper chez le cheval

Le harper, australien ou pas, se définit comme un mouvement d’hyperflexion incontrôlé postérieur (illustration avec cette vidéo).

Aujourd’hui, on différencie clairement deux formes de harper chez le cheval :

  • La forme dite classique :

    Elle fait souvent suite à un traumatisme du postérieur, ou à une arthropathie du jarret. L’atteinte est généralement unilatérale et se déclenche dans les jours, mois ou années suivant le choc. Elle est assez peu évolutive.

  • La forme dite australienne, sur laquelle nous nous concentrerons ici.

    La cause n’a pas encore été totalement établie, mais une origine toxique, notamment liée à l’ingestion de la porcelle enracinée est l’hypothèse principale. Cette forme se caractérise principalement par une atteinte locomotrice bilatérale parfois accompagnée d’une atteinte laryngée.

Symptômes et classification du harper australien

Les chevaux atteints de harper australien présentent un ensemble de troubles neurologiques, entrainant des symptômes principalement locomoteurs :

  • Une hyperflexion involontaire et bilatérale des postérieurs, visible en mouvement voire au repos dans les cas les plus graves.

Certains chevaux ne présentent de signes que lorsqu’ils reculent ou tournent très court.

L’animal pourra parfois aller jusqu’à se toucher le ventre à chaque mouvement des membres postérieurs.

Harper australien cheval

Credit photo : Haras Nationaux

  • Une amyotrophie, voire un amaigrissement
  • Du cornage et des anomalies du hennissement en cas d’atteinte neurologique du larynx. Le cheval pourra dans les cas les plus graves présenter des difficultés à déglutir ainsi que des bruits à la déglutition.

  • Du stress, de l’agitation parfois même de l’agressivité (envers l’homme mais aussi envers les autres chevaux).

  • Huntington et al. (1989) ont élaboré une classification toujours utilisée à l’heure d’aujourd’hui permettant une gradation de l’atteinte du Harper Australien :

DEGRÉ DE GRAVITÉ SIGNES CLINIQUES
I L’hyperflexion n’apparaît que lorsque le cheval recule, tourne ou est stressé.
II L’hyperflexion apparaît lorsque le cheval se met au pas ou au trot. Elle est accentuée quand le cheval recule, tourne court ou lorsqu’on lui prend le postérieur.
III Une hyperflexion modérée est visible au pas et au trot, plus particulièrement lorsque le cheval se met en mouvement ou qu’il s’arrête. Le galop est désuni, mais le postérieur ne vient pas au contact de l’abdomen. Le cheval a une certaine difficulté à reculer ou à tourner.
IV L’hyperflexion est exagérée. Le(s) postérieur(s) vien(ne)t frapper l’abdomen à toutes les allures et même à l’arrêt. Le cheval est dans l’incapacité de reculer et peine à tourner. Souvent l’hyperflexion apparaît également au repos et le cheval n’arrive pas à trotter.
V Le cheval ne peut se déplacer qu’en « sautillant comme un lapin ». Le(s) postérieur(s) sont maintenus en hyperflexion pendant plusieurs secondes.

Certains facteurs influencent directement le harper australien chez le cheval :

  • L’inactivité : une aggravation des signes cliniques du harper a été notifiée par les propriétaires chez les animaux restant longtemps immobiles ou passant la nuit au box.

  • Le stress : il exacerbe le harper et le fait ressurgir chez des animaux guéris.
  • Les conditions météorologiques : un climat frais et humide est à l’origine de manifestations de harper australien plus spectaculaires.

Le diagnostic du harper australien

Pour ce qui est du diagnostic, les symptômes sont évocateurs. L’évolution du cheval et le contexte permettront de faire la distinction entre le harper classique et le harper australien.

Il existe une seule méthode permettant de prouver que le cheval souffre d’un syndrome de harper : l’électromyographie (analyse de la fonction des nerfs et des muscles) mais on ne la réalise quasiment jamais en pratique.

La porcelle enracinée : la principale incriminée dans le déclenchement du harper australien

La Porcelle enracinée (ou Hypochoeris radicata L.) est une plante de la famille des Asteraceae qui ressemble fortement au pissenlit. Cette plante est souvent incriminée lorsqu’il est question de harper australien dans la mesure où son envahissement des sols a été concomitant avec l’apparition du harper.

Reconnaitre une porcelle enracinée 

Cette plante possède des feuilles dentelées, rugueuses, à la face supérieure poilue et organisées en rosette à la base de la plante. La tige de la plante est ramifiée.

Sa différence avec le pissenlit se fait au niveau des bractées (petites feuilles qui accompagnent chaque fleur). Celles-ci sont toutes dans le même sens chez la porcelle alors qu’une rangée sera horizontale chez le pissenlit.

La porcelle enracinée est neurotoxique.

Certains chevaux n’en mangeront jamais, mais ceux pour qui cela arrivera, même s’ils n’en mangent qu’une fois, développeront une toxicomanie avec une addiction les poussant à en ingérer fréquemment.

Il faut noter cependant que de récentes études remettent en question le rôle seul de la porcelle enracinée : celle-ci serait un facteur favorisant mais non suffisant au développement du syndrome de harper australien.

En effet, la molécule à l’origine du Harper australien est à ce jour encore inconnue.

On sait néanmoins qu’elle atteint le système nerveux central par une attaque oxydante : les chercheurs ont mis en évidence des lésions dégénératives au niveau des rameaux de certains nerfs contrôlant les muscles des membres postérieurs.

Traitement du harper australien et recommandations

Traitement médical

Dans la majorité des cas, on observe une rémission spontanée en quelques semaines, voire quelques mois, en retirant le cheval de la pâture. Plus l’atteinte est sévère et est ancienne, plus l’animal mettra de temps à récupérer et aura de risques de garder des séquelles.

  • L’intoxication étant chronique, l’administration de perfusions n’est pas efficace. Une cure drainante peut contribuer à améliorer l’état du cheval surtout si les symptômes sont observés rapidement. On peut aussi placer le cheval sous anti-oxydants, l’action neurotoxique étant principalement oxydative.
  • Le stress étant un facteur aggravant, il faut chercher à garder le cheval au calme jusqu’à rémission. 
  • Pour les cas très graves, on peut prescrire un antiépileptique, la phénytoïne (médicament humain) au cheval afin de le soulager. Cependant, celui-ci ne guérit aucunement de l’intoxication.En effet, suite à l’arrêt du traitement chez de nombreux chevaux, le harper retourne à son grade initial en quelques jours. De la même façon, l’administration de décontractants musculaires ou encore de tranquillisants, ne pourra être que bénéfique pour l’animal.

Traitement chirurgical 

En cas de séquelles sévères, il existe aussi un traitement chirurgical qui implique une section de l’extenseur latéral des phalanges des membres atteints du cheval. Une autre technique se base quant à elle sur une myoténectomie avec ablation d’une partie du muscle extenseur latéral.

Quelle efficacité pour ce traitement chirurgical ?

Des études montrent clairement une diminution quasi-totale de l’hyperflexion, instantanément à la suite de l’intervention, chez plus de la moitié des chevaux traités. D’autres n’ont pu être soulagés que partiellement, avec une amélioration apparaissant quelques mois après l’opération. Aucun des animaux traités n’a présenté de rechute après la myoténectomie.

Quelques recommandations

En ce qui concerne cette affection, la principale recommandation que l’on pourra formuler sera de changer immédiatement le cheval de pâture puis de la désherber. En effet, la toxicomanie provoquée par l’ingestion de la plante poussera le cheval à en consommer à nouveau par la suite.

On pourra préventivement éloigner les chevaux des parcelles où la porcelle enracinée est présente, et éviter la pâture sur des terrains trop pauvres qui pousseront les animaux à ingérer des plantes qu’ils n’auraient pas approchées en temps normal.

Pour conclure : 

On retiendra que le harper australien est une affection caractérisée par une hyperflexion involontaire des deux membres postérieurs chez le cheval, par une amyotrophie, et parfois une hémiplégie laryngée ainsi que des modifications de comportement. La cause principalement retenue à l’heure d’aujourd’hui est une intoxication due à l’ingestion de porcelle enracinée, une plante d’allure similaire au pissenlit. Celle-ci serait cependant un facteur favorisant mais non suffisant à l’apparition du harper.

Si la guérison spontanée semble souvent observée, il est aussi possible de soulager le cheval avec un antiépileptique ou un tranquillisant. Il sera de plus nécessaire de surveiller les prairies, notamment les pâtures les plus pauvres après une période sèche.

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Références :

  • COLLIGNON Guillaume, Pierre, Marie. « Contribution à l’étude épidémiologique de l’enzootie de harper australien en France depuis 2003 chez le cheval ». ENVT, 2007.
  • RIRDC. « Investigation into the cause of australian stringhalt ». Rural Industries Research and Development Corporation, s. d., N° 11/127 édition, sect. Project No PRJ-003742.
  • DOMANGE C., CASTEIGNAU A., COLLIGNON G., PUMAROLA M. et PRIYMENKO N., 2010. Longitudinal study of Australian stringhalt cases in France. Journal of Animal Physiology and Animal Nutrition, 94, pages 712-720.
  • HUNTINGTON P.J., JEFFCOTT L.B., FRIEND S.C.E., LUFF A.R., FINKELSTEIN D.I., FLYNN R.J.: Australian stringhalt: epidemiological, clinical and neurological investigations, Equine Veterinary Journal, 1989, 21, 266-273.