Mélanomes chez le cheval

Le mélanome est une tumeur affectant les cellules mélanocytaires (pigmentaires) de la peau, sans prédisposition raciale ou sexuelle. Les chevaux à robe grise sont particulièrement touchés (plus de 80% atteints chez les plus de 15 ans), rendant cette maladie de peau relativement fréquente puisqu’elle représente environ 10% des tumeurs cutanées du cheval.

Il faut savoir qu’elle peut concerner tous les types de robes, cependant elle reste exceptionnelle chez les chevaux non gris. On estime qu’entre un tiers et deux tiers des mélanomes chez le cheval progressent vers la malignité (développement de métastases). C’est pourquoi la détection précoce de cette affection entre grandement en jeu en ce qui concerne le pronostic associé.

Comment reconnaitre les mélanomes chez le cheval ?

On peut reconnaitre le mélanome chez un cheval grâce à différents critères :

Melanome cheval
  • C’est un nodule ferme de taille variable, cutané ou sous-cutané, pouvant s’ulcérer (perte de substance de la masse) ou former une croûte. Le plus souvent, cette masse tumorale sera pigmentée (noire). En cas d’ulcération, elle peut produire un jus noirâtre.
  • On le trouve le plus souvent en région périnéale et périanale, sous la queue, au niveau du fourreau, des parotides ou encore des lèvres ou des paupières.

  • On peut avoir sur un même cheval plusieurs mélanomes, qui peuvent rester stables ou se rejoindre les uns les autres, augmenter de taille ou se multiplier (notamment sur les chevaux gris et en région périnéale).

Les signes cliniques associés dépendent de l’envahissement tumoral :

  • Des mélanomes envahissants en région anale et périnéale sont souvent accompagnés de troubles de la défécation.

  • Un mélanome inguinal (au dessus du scrotum) pourra être accompagné de troubles urinaires ou génitaux.

  • Un mélanome pourra aussi engendrer une compression nerveuse à l’origine de phénomènes paralytiques.

  • Les métastases sont possibles au niveau des vaisseaux sanguins, des poumons, du tube digestif et organes associés (glandes annexes) ou des os. D’autres localisations sont parfois décrites au niveau de l’œil, des poches gutturales ou du système nerveux. Des signes cliniques associés à la localisation des métastases peuvent donc être observés.

  • En cas de mélanomes autour de la région anale, l’inflammation locale peut-être très gênante, notamment en été avec la chaleur et les insectes. Le cheval a tendance à se gratter, les mélanomes peuvent s’ulcérer et suinter, attirant les mouches. Les soins locaux en cas de ponte et de myiases (asticots) peuvent devenir un calvaire pour le cheval comme le propriétaire.

Remarque : lors du développement de métastases, celles-ci atteignent dans un premier temps les nœuds lymphatiques régionaux de la tumeur principale. On pourra alors éventuellement voir qu’ils sont hypertrophiés (gonflés).

Le mélanome est enfin une tumeur qui produit beaucoup de pigments (en relation avec les cellules touchées).

Ces derniers vont s’accumuler dans le sang et les urines et peuvent ainsi modifier leur couleur.

En savoir plus : Classement des tumeurs mélanocytaires (mélanomes) chez le cheval

En ce qui concerne les tumeurs mélanocytaires du cheval, on distingue (classification proposée par Valentine (1995) :

  • Le naevus mélanocytique : une tumeur superficielle de l’animal jeune et qui n’évolue pas avec l’âge. Dans ce cas il n’y a pas de prédisposition liée à la robe de l’animal.
  • Le mélanome dermique : une tumeur isolée apparaissant plus tardivement, souvent bénigne. Cette forme est très fréquente chez les chevaux gris et peut évoluer vers la formation d’une mélanomatose (différents mélanomes multiples).

  • La mélanomatose dermique : c’est le résultat du regroupement de plusieurs mélanomes dermiques. Dans ce cas la formation de métastases à distance est très fréquente. C’est une affection à laquelle les chevaux à robe grise sont prédisposés, notamment au niveau de la région périnéale.

  • Le mélanome malin anaplasique : rare, mais agressive, cette affection est systématiquement associée à la formation de métastases. On ne note pas de prédisposition particulière liée à la robe.

Le diagnostic précis entre les différentes formes peut être fait via biopsie puis analyse histologique (examen des tissus au microscope)

Cependant, la biopsie est rarement pratiquée sur le terrain, car le diagnostic clinique est relativement aisé grâce à l’aspect, la localisation et au contexte (robe du cheval, âge, évolution lente ou rapide).

L’analyse histologique est malheureusement peu précise pour donner le degré d’agressivité d’une mélanomatose, à part dans les rares cas de mélanomes malins anaplasiques. Elle ne permet pas forcément de dire si la mélanomatose va se développer de façon très rapide ou non, ce qui est en général l’interrogation principale des propriétaires.

Quelles sont les causes du développement des mélanomes chez le cheval ?

La peau est fréquemment la cible de maladies néoplasiques (cancéreuses). En effet, les cellules y sont en continuel renouvellement, favorisant le développement de tumeurs primaires mais aussi de métastases secondaires à des tumeurs de tissus sous-jacents.

A l’heure actuelle, les mécanismes à l’origine de l’installation des tumeurs mélaniques sont encore discutés. Néanmoins, un lien entre le développement du mélanome et la robe grise est indéniable.

La principale hypothèse d’explication est que la peau du cheval gris est la plus foncée, et donc la plus riche en mélanine.

Traitement des mélanomes chez le cheval

Le traitement dépend du type de mélanome affectant l’animal :

  • Lors d’un naevus mélanocytique, aucun traitement n’est nécessaire. En effet, la tumeur est superficielle et non agressive. Elle n’évoluera pas avec le temps.

  • Lors de mélanomes dermiques : le pronostic est plus réservé.

    En effet, si leur évolution est relativement lente, une extension ne peut être exclue et elle sera même fréquente passée 15 ans. Dans ce cas, on peut envisager une opération précoce, c’est-à-dire avant le passage au stade de mélanomatose dermique. Cependant les récidives sont très nombreuses après la chirurgie.

Le problème du mélanome est que, bien souvent, celui-ci se développe petit à petit, et ne vient à gêner que lorsqu’il a atteint une taille trop importante.

Le petit mélanome unique peut être retiré de façon isolée s’il est sur la peau à un endroit accessible. En cas de mélanome sous la queue, la suture sera souvent difficile. Le vétérinaire choisira le plus souvent de le laisser, d’autant que d’autres risquent de pousser à peine la plaie cicatrisée.

Dans l’idéal, la chirurgie devrait être associée à une chimiothérapie.

Malheureusement, il existe peu de molécules efficaces. Les injections de cisplatine utilisées pour les sarcoïdes n’ont pas montré une réelle efficacité sur les mélanomes chez le cheval. La radiothérapie, encore peu pratiquée est à l’étude et en développement.

Moins agressive que la chimiothérapie, la complémentation en cimétidine (médicament utilisé habituellement pour ses propriétés anti-acide) a été étudiée. Si elle ne garantit pas de succès, elle ne fait pas de mal, et peut être utilisée pour freiner l’évolution des mélanomes.

En cas d’analyse révèlant un mélanome malin anaplasique, un bilan d’extension (examen clinique complet et poussé de l’animal) sera réalisé afin de rechercher d’éventuelles métastases. Dans ce cas, après ablation éventuelle de la tumeur, une chimiothérapie est particulièrement indiquée pour faire régresser les métastases.

Actuellement, la plupart des chevaux souffrant de mélanomes sont gérés par traitement conservateur.

Il ne s’agit pas de retirer le mélanome mais simplement de donner le maximum de confort au cheval atteint. Ainsi, la localisation la plus fréquente étant au niveau de l’anus, de nombreux chevaux peuvent avoir du mal à évacuer leurs crottins.

Une complémentation en son ou en huile de paraffine peut permettre de ramollir les crottins pour faciliter leur évacuation. Une alimentation la plus humide possible (mise à l’herbe idéalement) est conseillée.

Localement une désinfection régulière est recommandée en cas d’ulcération, notamment en été pour éviter la prolifération des insectes voire des vers. En parallèle, le cheval doit être protégé au maximum contre les mouches (couvertures, sprays, répulsifs en stick…)

Pour conclure : 

En ce qui concerne les mélanomes chez le cheval, il faut principalement retenir leur caractère imprévisible : le choix du traitement est très limité et une évolution défavorable ne peut presque jamais être exclue totalement. La prise en charge chirurgicale présente de plus un taux élevé de récidive pour certains mélanomes malins et pour les mélanomatoses.

De nouvelles études sont à ce jour en vue d’améliorer la prise en charge des animaux atteints. L’exérèse au laser au dioxyde de carbone (CO2) semble par exemple représenter une perspective encourageante avec un taux de récidive diminué suite à l’ablation chirurgicale de la tumeur.

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Références :

  • BENSIGNOR, Emmanuel, Daniel GROUX, et Christophe LEBIS. Les maladies de peau chez le cheval. Maloine. Les maladies du cheval. Paris, 2004.
  • THIBERT, Sandy. « L’expression cutanée des affections systémiques chez le cheval ». ENVL, 2007.« Traitement de 53 mélanomes cutanés chez le cheval (2003-2012) ». Pratique Vétérinaire Equine 2014, Cancérologie équine, no 184 (2014): 4651.