Les coliques du cheval

Les coliques représentent la première cause de mortalité chez le cheval, expliquant ainsi le fait qu’elles soient tant redoutées par les propriétaires. De plus, il s’agit de l’urgence la plus fréquemment rencontrée en médecine vétérinaire équine. Les coliques du cheval sont définies comme des douleurs abdominales ayant diverses origines digestives voire extra-digestives. Il est important de comprendre qu’il ne s’agit pas d’une maladie mais d’un syndrome, soit un ensemble de symptômes. En effet, une douleur abdominale va déclencher de nombreux symptômes tous plus ou moins identiques quelle que soit l’origine de la douleur (estomac, intestins ou parfois d’autres organes). Une prise en charge rapide par un vétérinaire est indispensable afin d’éviter toute aggravation, et dans certains cas, une opération chirurgicale est nécessaire pour sauver la vie du cheval.

Coliques du cheval : quels sont les symptômes ?

Une colique étant une manifestation douloureuse, les symptômes vont varier en fonction du cheval et de son expression de la douleur.

Il existe une classification en 5 stades d’intensité de la douleur lors des coliques du cheval.

L’évolution d’un stade à un autre peut être rapide, il est donc nécessaire de bien observer son cheval et le plus souvent possible.

Stade 1
Absence de douleur : Aucun symptôme.

Stade 2
Douleur légère : Le cheval gratte le sol, se regarde les flancs, a un manque d’appétit ou encore se couche plus longtemps que la normale.

Stade 3
Douleur modérée : Le cheval est agité, se tape le ventre avec ses postérieurs, reste longtemps couché ou encore prend une position de « chien assis ».

Stade 4
Douleur sévère : Le cheval se roule violemment, transpire beaucoup ou encore se laisse violemment tomber par terre..

cheval couché

Stade 5
Le cheval est en état de dépression sévère

Ce sont ces signes de douleur qui vont généralement alerter le propriétaire puisque le cheval n’est pas dans son état normal.

Il est indispensable de prévenir votre vétérinaire afin d’agir en conséquence, et ainsi éviter toute aggravation.

Il examinera les paramètres cliniques suivants, généralement associés aux coliques du cheval :

  • Fréquence cardiaque : augmentation (tachycardie) proportionnellement à la douleur. C’est un bon indicateur de la gravité des coliques du cheval.

  • État des muqueuses : congestives (couleur rose foncé), liserées voire violacées en cas d’état de choc du cheval.
  • Les bruits intestinaux : diminués voire absents, ils sont audibles par auscultation abdominale à l’aide d’un stéthoscope.
  • Déshydratation : plus ou moins avancée en cas de coliques sévères.
  • La palpation transrectale permet de vérifier le bon positionnement ou le déplacement des intestins du cheval, en particulier du colon, ainsi que de juger de la distension gazeuse intestinale ou de détecter une masse.

  • Le contenu de l’estomac, évalué lors du sondage naso-gastrique, renseigne sur l’état du transit (vidange gastrique normale, ralentie ou arrêt complet voire reflux). Le reflux correspond au retour en arrière des sécrétions intestinales vers l’estomac et signe un arrêt complet du transit du cheval.

  • L’échographie peut compléter la palpation transrectale, en confirmant un déplacement du colon, en évaluant la distension et la motilité de l’intestin grêle du cheval. Elle permet aussi de détecter la présence de liquide d’épanchement abdominal

En évaluant ces paramètres cliniques, le vétérinaire va chercher à estimer la gravité de la colique du cheval et orienter le diagnostic.

Origines mécaniques (« coliques vraies »)

Les coliques du cheval, au sens « classique » du terme correspondent en général à un ralentissement ou à un arrêt du transit digestif, même si parfois d’autres causes donnent des symptômes similaires.

Ces troubles du transit chez le cheval peuvent être liés à toutes sortes de dysfonctionnements.

Le rôle du vétérinaire va être de diagnostiquer à quel niveau se situe le problème.

Puis de préciser au maximum le diagnostic, de façon à choisir le meilleur traitement le plus rapidement. En fonction du diagnostic, il tentera également de donner un pronostic, c’est à dire d’évaluer la gravité de la colique.

Pour bien comprendre ce qui se passe chez le cheval lors de coliques d’origine digestive, nous allons plus particulièrement nous intéresser aux différentes causes possibles en fonction de la localisation dans le tube digestif.

 1 – Estomac du cheval

Ces coliques sont généralement médicales mais peuvent être très douloureuses et plus compliquées à diagnostiquer.

  • Impaction : Une consommation d’aliments trop grossiers, en particulier la paille, et en trop grosse quantité peut être à l’origine d’une surcharge de l’estomac.
    En effet, chez le cheval, il est proportionnellement assez petit (15 à 20L), et ne peut pas évacuer le trop-plein par vomissement (l’entrée est « à sens unique »). Un estomac distendu est particulièrement douloureux pour le cheval.
  • Ulcères gastriques : Fréquents, ils forment une catégorie de coliques un peu à part, souvent peu intenses mais récidivantes. Ils sont souvent liés au stress, à l’alimentation ou au mode de vie ou encore parfois à l’administration d’anti-inflammatoires non stéroïdiens.
estomac cheval

Ce type de colique est normalement résolu par sondage naso-gastrique, réalisé par le vétérinaire.

2 – Intestin grêle

Ces coliques nécessitent le plus souvent une intervention chirurgicale.

Intestin grêle cheval
  • Impaction de l’iléon : Il s’agit d’une accumulation de particules alimentaires dans l’iléon (partie terminale de l’intestin grêle) formant un bouchon. Ce bouchon peut être levé par traitement médical précoce (laxatifs, perfusions). Si le transit est totalement arrêté, seule la chirurgie permettra de résoudre le problème.
  • Hernie inguinale : Une partie de l’intestin va passer au travers d’un des anneaux inguinaux (par lequel passent les cordons des testicules) et rester coincé. Le transit est alors totalement interrompu. Une chirurgie d’urgence est nécessaire.
  • Foramen épiploïque : l’intestin vient se coincer dans un petit orifice à l’intérieur de l’abdomen. Les conséquences sont les mêmes que pour la hernie inguinale, et il faut opérer d’urgence. Dans le même principe, l’intestin grêle peut aussi s’enrouler autour d’une boule de gras, ou parfois se nouer sur lui-même. Seule la chirurgie permet de savoir ce qui se passe et de résoudre le problème.
  • Iléus paralytique : Il s’agit d’une paralysie de l’intestin (occlusion intestinale sans obstruction physique). Elle est plus rare, et généralement la conséquence d’un autre type de colique.

3 – Caecum

  • Impaction : il s’agit d’une surcharge du caecum en particules solides. Elle se résout en général médicalement, mais peut nécessiter une diète assez longue le temps d’évacuer petit à petit le contenu de ce grand réservoir.
  • Distension gazeuse : elle est souvent consécutive à un arrêt du transit et donc à un autre type de colique, mais peut être douloureuse. L’excès de gaz peut être évacué par le vétérinaire à l’aide d’un trocard (grosse aiguille).
Cæcum cheval

4 – Colon

colon du cheval
  • Impaction : surcharge alimentaire du colon. Une trop grande quantité d’aliment sec s’accumule, formant un bouchon. C’est une des coliques du cheval les plus fréquentes. Elle se soigne en général bien avec l’administration de laxatifs et d’antalgiques.
  • Déplacement du colon à gauche : Le colon va se déplacer vers la gauche et se coincer entre la rate et la paroi abdominale gauche. Parfois, le colon peut même remonter jusqu’à l’espace situé entre le rein gauche et la rate. Cela s’appelle l’entrappement néphro-splénique.
  • Déplacement du colon à droite : Le colon va se déplacer et se retrouver entre le caecum et la paroi abdominale droite. Ce déplacement à droite est moins fréquent que celui à gauche.

NB : Les déplacements du colon sont souvent secondaires à une surcharge. Ils se résolvent avec un traitement médical dans 70% des cas environ. Dans les autres cas, une chirurgie est nécessaire pour débloquer le colon du cheval.

  • Volvulus du gros colon : torsion du gros colon sur lui-même. Cette colique est la plus grave et la plus fulgurante. La douleur est intense, et seule une chirurgie extrêmement rapide peut permettre de sauver le cheval.

5 – Rectum

  • Blocage de la vidange rectale : le cheval n’arrive pas à évacuer les crottins. La cause la plus fréquente est l’obstruction par des mélanomes.

6 – Diarrhées, spasmes

  • Dans certains cas, les signes de coliques sont liés à un transit accéléré (diarrhée) avec des spasmes douloureux. Cette catégorie fait l’objet d’un traitement complètement différent.

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Origines extra-digestives (« fausses coliques »)

Il s’agit de coliques dont l’origine de la douleur n’est pas digestive. Elles sont plus rares mais peuvent provoquer les mêmes symptômes.

  • Origine utérine : torsion utérine ou contractions durant la gestation
  • Origine hépatique : par exemple hépatite infectieuse ou suite à une intoxication
  • Origine rénale/urinaire : cystite ou pyélonéphrite (infection ou inflammation des reins)
  • Origine respiratoire : pleurésie
  • Origine musculaire/squelettique : fourbure ou myosite (inflammation musculaire)
  • Origine vasculaire/cardiaque : hémorragie ou infarctus du myocarde

Dans la plupart des cas, d’autres symptômes permettront d’orienter le diagnostic.

Quels traitements pour soigner les coliques du cheval ?

C’est votre vétérinaire qui déterminera la gravité de la colique du cheval.

L’examen de votre cheval, comprenant systématiquement une palpation transrectale et un sondage naso-gastrique, sauf en cas d’impossibilité à les réaliser (si trop dangereux), lui permettra d’orienter le diagnostic vers une des causes citées plus haut. Il peut également réaliser des examens complémentaires (analyses sanguines, paracentèse abdominale, échographie), pour juger de la nécessité et de l’urgence d’une chirurgie.

Si c’est le cas, le cheval devra être hospitalisé au sein d’une clinique spécialisée, de façon à pouvoir être opéré immédiatement.

Il faut savoir que le budget d’une telle intervention est très élevé (en moyenne 5000€) et qu’elle implique une longue convalescence.

Les chances de succès dépendent de l’état du cheval, de l’avancée des symptômes et de la cause de la colique.

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Sinon un traitement médical adapté sera mis en place.

sondage cheval colique

Vétérinaire en train de faire un sondage nasogastrique.

Des antispasmodiques ainsi que des anti-inflammatoires non stéroïdiens seront administrés pour apaiser le transit et diminuer la douleur. Si celle-ci est importante, de la morphine peut également être administrée.

Dans la plupart des cas, le vétérinaire administre aussi de la paraffine dans l’estomac du cheval via le sondage nasogastrique. Il peut décider de perfuser le cheval afin de soutenir l’organisme, de le réhydrater, et de réhydrater le contenu digestif.

Dans tous les cas, même en cas de petite colique, le cheval devra être mis à la diète hydrique (eau à volonté) jusqu’à résolution complète.

La réalimentation se fera progressivement à l’aide d’aliments facilement digestibles comme du son.

Prévention des coliques du cheval

On ne peut pas supprimer complètement le risque de colique chez le cheval, car certaines causes sont totalement indépendantes de nos actions. Cependant il existe un grand nombre de facteurs favorisants.

On peut citer :

  • Une trop grande consommation de nourriture sèche (surtout la paille, parfois même le foin) avec un abreuvement insuffisant,
  • L’ingestion de sable,
  • Le parasitisme,
  • Le stress,
  • Ou encore les chevaux qui tiquent (aérophagie).

Les changements de pression atmosphérique ont également une influence, il faut donc être particulièrement vigilant en cas de changement de temps.

Plusieurs mesures préventives sont à mettre en place afin de diminuer le risque d’apparition de coliques. Puisque celles-ci sont majoritairement liées à l’alimentation, sa gestion est donc primordiale.

Ainsi, les mesures suivantes peuvent être appliquées :

  • Respecter une durée minimale d’ingestion de 5 heures par jour avec au minimum 4 à 5 kg de foin par jour, si possible dans un filet à foin
  • Fractionner la ration en plusieurs petits repas dans la journée
  • Donner de l’eau à volonté, pas trop froide et de façon non brutale
  • Respecter une transition alimentaire sur une semaine en mélangeant le nouvel aliment avec l’ancien
  • Proscrire le blé qui favorise une forte fermentation
  • Assurer une bonne conservation des aliments
  • Pour les chevaux coliquards chez qui ces mesures ne suffisent pas, il existe des compléments pour soutenir et stimuler le transit. Chez ceux à risque de colique de sable, des cures de psyllium régulières sont conseillées.

De plus, la gestion de l’environnent est également à prendre en compte.

En effet, plus un cheval est confiné au box, plus le risque d’apparition de coliques est élevé. En conséquence, des sorties régulières au pré sont recommandées.

Un changement brutal d’environnement, source de stress et donc d’apparition de coliques, est à éviter.

La gestion des parasites intestinaux est bien évidemment primordiale. Une vermifugation correcte et régulière est recommandée puisque certains parasites digestifs peuvent être responsables de coliques.

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Pour conclure :

Le cheval est un animal très sujet aux coliques. Ses intestins, très peu fixés dans l’abdomen et qui peuvent donc bouger facilement, sont sensibles à de nombreux facteurs comme le stress. Ceci explique pourquoi les coliques sont très fréquentes chez le cheval.
Les symptômes vont être presque similaires quelle que soit la cause. Il est important de prévenir rapidement le vétérinaire car une évolution fatale peut très vite arriver.
Il est donc fondamental savoir les reconnaître et de prévenir leur apparition en passant par une bonne gestion de l’alimentation, du stress, de l’environnement ainsi que de la vermifugation.

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Références :

  • Laure Walter. Étude épidémiologique descriptive de 831 cas de coliques médicales en France dans le département des Yvelines (1994-2004) [en ligne]. Thèse Docteur Vétérinaire. Créteil : Faculté de médecine de Créteil, 2006, 139 p. Disponible sur : http://theses.vet-alfort.fr/telecharger.php?id=37 (consultée le 30/12/2017).
  • Anne Couroucé-Malblanc et Francis Desbrosse. Maladies des chevaux, 2ème édition. Guides France Agricole, 2010.