Infiltrations chez le cheval

De nombreuses affections ostéo-articulaires peuvent impacter le confort du cheval et sa carrière sportive. Parmi les plus redoutées, on retrouve l’arthrose ou ostéoarthrite, qui est une affection dégénérative articulaire particulièrement douloureuse et invalidante pour le cheval. Elle correspond à une érosion progressive du cartilage articulaire, jouant habituellement le rôle d’amortisseur pour les surfaces osseuses, qui se retrouvent alors en contact direct, causant une réaction inflammatoire locale, et un remodelage osseux.

Les chevaux seniors n’ont pas le monopole de l’arthrose et même des chevaux plus jeunes peuvent être concernés, provoquant une retraite sportive anticipée.

Pour ralentir la dégénérescence du cartilage, limiter le remodelage osseux, et/ou soulager la douleur du cheval il est possible de réaliser différentes sortes d’infiltrations ou des traitements par voie générale (anti-inflammatoires, perfusion de biphosphonates, le TILDREN étant le plus connu, ou son équivalent par voie-intramusuclaire, l’OSPHOS).

Grâce au développement de la médecine régénérative, il s’entrouvre l’espoir de pouvoir régénérer le cartilage lésé, ce qui n’était jusque-là pas possible.

Qu’est-ce qu’une infiltration ?

Le terme infiltration est synonyme d’une injection de médicament dans une articulation.

Elle est proposée par le vétérinaire suite à un examen orthopédique et la mise en évidence par de l’imagerie (radiographie, échographie, IRM, etc..) de lésions articulaires ou osseuses.

L’objectif est de permettre au produit d’arriver directement dans l’articulation touchée et d’augmenter ainsi son efficacité. Cela permet aussi de limiter les effets secondaires éventuels d’un traitement anti-inflammatoire par voie générale (risques d’ulcères gastriques par exemple).

Techniquement, toutes les articulations du cheval peuvent être infiltrées (pied, paturon, boulet, jarret, grasset, articulations du dos, cervicales, etc..).

En général ce sont les articulations les plus mobiles qui ont tendance à être les plus douloureuses lorsque de l’arthrose se développe.

infiltration-cheval

Attention, le terme infiltration est utilisé de manière fréquente pour des injections dans le dos qui ne sont pas toujours des injections intra-articulaires mais parfois d’autres soins, comme de la mésothérapie ou des injections entre deux os proches par exemple, ou pour soulager certaines contractures musculaires chez le cheval.

=> Cet article ne traite que des infiltrations stricto-sensu, donc injections intra-articulaires.

Quels produits sont injectés lors d’infiltration chez le cheval ?

Les produits injectés par voie articulaire ont pour objectif principal de limiter la douleur et de réduire l’inflammation.

Les nouvelles technologies de médecine régénérative, telles que les cellules souches, l’IRAP et le PRP peuvent permettre la restauration de l’intégrité de certains tissus dans l’articulation, et apportent des facteurs biologiques permettant de lutter contre l’inflammation locale.

Le tableau ci-dessous reprend les différentes molécules qui peuvent être injectées par voie intra-articulaire, leurs indications ainsi que les avantages et inconvénients.

Produits utilisables lors d’infiltrations Nature du produit Rôle / indications Avantages Inconvénients
Corticoïdes Anti-inflammatoire non stéroïdien Arthrose, douleur articulaire Economique

Puissant anti-inflammatoire local

Contribue à limiter la douleur.

Délai doping variable selon l’effet retard du produit.

Utilisation controversée

Peut avoir des effets délétères sur le cartilage en cas d’utilisation répétée.

Acide hyaluronique Agent responsable de la viscosité et de l’élasticité du liquide synovial Réduction des phénomènes inflammatoires

Restaure une lubrification dans l’articulation

Indiqué lors d’arthrose

Limite le contact entre les surfaces osseuses et donc limite l’inflammation.

Rôle mécanique et effet anti-inflammatoire.

Non dopant.

Coût élevé

Pas d’effet régénératif

Effet qui s’estompe très rapidement

PRP = plasma enrichi en plaquettes Obtenu à partir  du sang du cheval lui-même. Après double centrifugation dans des conditions stériles, il est ensuite réinjecté. Son utilisation principale concerne les tendinites, mais s’utilise également en infiltration lors d’arthrose Traitement sûr puisque le sang utilisé provient du cheval lui-même.

Le plasma obtenu est riche en facteurs de croissance = protéines qui favorisent la régénération des tissus.

Non dopant

Coûteux
IRAP Nom de la protéine d’intérêt (Interleukine-1 Receptor Antagonist Protein) contenue dans le sérum du cheval à traiter, à laquelle s’ajoutent d’autres facteurs de croissance Utilisé en injection intra articulaire pour le traitement de l’inflammation.

Indications majeures = chevaux qui présentent une inflammation synoviale exclusive / chevaux qui répondent mal aux traitements anti-inflammatoires ou chevaux qui expriment une douleur ou une inflammation récurrente

Anti-inflammatoire naturel produit directement à partir du sang du patient.

Un prélèvement sanguin permet d’effectuer en moyenne 5 à 6 fois un traitement de 2 articulations.

Le sérum est conservé au congélateur et pourra être réutilisé dans les 12 mois qui suivent le prélèvement.

Non dopant.

coûteux
Cellules souches Cellules ayant la capacité de se transformer en cellules cartilagineuses, permettant théoriquement la régénération tissulaire. Issues de la moelle osseuse ou de cellules graisseuses.

Plutôt utilisées lors d’atteinte tendineuse, mais de plus en plus employées lors d’arthrose pour leur côté régénératif.

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Thérapie régénérative d’avenir.

Bien tolérées,

effet immuno-modulateur et propriétés anti-inflammatoires.

Sources de facteurs de croissance, elles ont un effet attractif pour de nombreuses substances pro-régénératives et «stimulent » les cellules du tissu receveur.

Stimulent la régénération du cartilage.

Coûteux

Quels sont les risques liés aux infiltrations chez le cheval ?

Malgré les nombreux bénéfices potentiels, les injections intra-articulaires ne sont pas dénuées de risques chez le cheval.

Cette technique ne peut être réalisée que par un vétérinaire et chaque articulation doit être traitée séparément. 

aiguille cheval

Chaque injection dans l’articulation entraîne un risque d’infection bactérienne, même si le vétérinaire réalise l’infiltration après une désinfection locale et une asepsie rigoureuse (gants et matériel stérile), la contamination de l’aiguille est toujours possible.

Moins fréquent heureusement, il peut arriver que l’aiguille se casse dans l’articulation. Cela ne survient que très rarement, mais malgré tout le risque existe.

Quelles sont les alternatives aux infiltrations ?

Le tissu osseux évolue en permanence, entre construction et résorption.

Lors de contraintes biomécaniques répétées, il peut y avoir un déséquilibre entre ces deux phénomènes, et si la résorption dépasse la régénération osseuse, cela conduit à une « ostéolyse » (destruction du tissu osseux), responsable d’une douleur osseuse et donc d’une boiterie.

Ces remaniements osseux sont très importants lors d’arthrose chez le cheval.

Les biphosphonates

Pour limiter le remaniement osseux, la douleur osseuse et le développement de l’arthrose, des biphosphonates peuvent être utilisés.

Il en existe deux : le tiludronate disodique (Tildren ®) ou le clodronate disodique (Osphos ®).

Ces traitements peuvent aussi être réalisés dans le cadre d’autres affections ostéoarticulaires telles que la maladie naviculaire ou les conflits de processus épineux. 

2 types de cellules sont responsables de l’équilibre perpétuel entre construction et déconstruction du tissu osseux :

  • Les ostéoclastes : responsables de la résorption du tissu osseux = les agents de déconstruction
  • Les ostéoblastes : colonisent le site de résorption et reforment de l’os « neuf ». Ces derniers produisent de l’interleukine-6, un messager qui active les ostéoclastes, et donc la destruction du tissu osseux du cheval.

Les biphosphonates ont une double action :

  • ils vont inhiber la synthèse d’IL6, et donc limiter l’activité de ces fameux ostéoclastes responsables de la résorption osseuse,
  • ils vont également agir directement sur ces cellules, en se fixant sur l’os, préférentiellement au niveau des zones de remodelages (à l’origine de la douleur), puis ils pénètrent dans les ostéoclastes pour les détruire.

Ainsi les bisphosphonates diminuent l’ostéolyse (destruction osseuse) et de ce fait, diminuent la douleur liée à ce remodelage.

Le traitement à base de tiludronate disodique (Tildren ®), peut se faire sous forme de perfusion par voie intraveineuse générale, ou au niveau d’un membre par perfusion intraveineuse sous garrot.

Le traitement à base de clodronate disodique (Osphos ®), s’effectue par le biais d’une injection intra-musculaire uniquement.

Les effets de ce genre de traitement peuvent varier d’un cheval à l’autre, mais en général l’effet maximal obtenu s’observe 2 mois après l’injection, et le traitement doit généralement être répété une fois par an.

Dans certains cas, les traitements doivent être rapprochés ou au contraire peuvent être espacés.

Les compléments alimentaires

De nombreux compléments alimentaires se développent avec pour objectif d’apporter par voie orale des molécules aux effets anti-inflammatoires, antalgiques, favorisant la régénération tissulaire, ou apportant des chondroprotecteurs et autres précurseurs de la synthèse osseuse, de façon à promouvoir l’intégrité articulaire et soulager la douleur du cheval.

Quelques exemples de plantes utilisées dans le cadre de l’arthrose chez le cheval :

  • L’harpagophytum (antalgique puissant pour les douleurs articulaires)
  • Le curcuma (propriétés anti-inflammatoires, détoxifiantes, anti-oxydantes)
  • La reine des prés (caractéristiques proche de l’aspirine, soulage les douleurs articulaires)
  • La prêle (riche en silice et minéraux, soutient la fonction osseuse, vertus reminéralisantes)
  • La Boswellia (propriétés anti-inflammatoires et antalgiques articulaires)
curcuma-cheval

Des compléments “tout faits” sont formulés par des laboratoires avec les mêmes objectifs, à base de plantes ou d’autres molécules chondroprotectrices, telles que l’Ekyflex arthro de Audevard, le Vetidol de Fedvet, etc..

Il faut toutefois se rappeler qu’il existe peu de publications scientifiques prouvant réellement l’efficacité des produits administrés par voie orale, et notamment la question de la biodisponibilité après passage dans l’estomac se pose souvent.

Conclusion :

L’arthrose, comme d’autres affections ostéo-articulaires douloureuses, n’est plus une fatalité. Le développement de la médecine vétérinaire ou des thérapies régénératives entrouvrent l’espoir d’une prise en charge de la douleur articulaire de plus en plus optimale.

Les infiltrations font partie des possibilités de traitement, mais peuvent être associées à d’autres thérapies complémentaires comme les biphosphonates, ou l’apport de compléments alimentaires par voie orale.

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