La luzerne dans l’alimentation du cheval
La luzerne est une plante légumineuse vivace, originaire d’Asie du Sud-ouest, qui pousse de préférence sous des climats chauds et secs, mais que l’on rencontre également en région tempérée.
Cette légumineuse souvent sous-estimée ou redoutée était pourtant déjà utilisée en guise de fourrage il y a 2000 ans !
La luzerne se distingue des autres fourrages par sa richesse en protéines de qualité et notamment en acides aminés, et sa forte teneur en calcium. Elle possède également d’autres caractéristiques, elle est riche en fibres, pauvre en amidon et en sucre, et de récentes études s’intéressent à son effet bénéfique sur le microbiote et donc son éventuelle contribution à une bonne santé du système digestif.
Elle est utilisée principalement sous deux formes : en fourrage (foin de luzerne) ou sous forme déshydratées (en granulés ou bouchons). Elle est également régulièrement incorporée à des aliments concentrés complémentaires de fourrage, en tant que matière première.
La luzerne a ses adeptes, certains ne jurent que par elle, lui conférant le titre « d’aliment miracle » en raison de ses excellentes propriétés nutritionnelles, tandis que d’autres l’accusent d’être à l’origine de troubles digestifs telles que les coliques ou les diarrhées. En réalité, les avantages de la luzerne sont également à l’origine de ses inconvénients !
Sommaire
Différence entre le foin « classique » et le foin de luzerne
Le foin est issu de l’herbe fauchée et séchée qui peut contenir une multitude de plantes, s’il provient de prairies naturelles, ou de graminées sélectionnées et semées, comme le « ray grass » par exemple.
Lorsque la composition des espèces de plantes n’est pas connue ou varie d’une année à l’autre, il est difficile de connaitre la composition de ces foins. Leur teneur en protéines, minéraux et leur valeur énergétique varient aussi avec le moment de la coupe.
Le foin de luzerne, lui, provient exclusivement, comme son nom l’indique, de cette plante légumineuse.
Sa composition nutritionnelle est plus stable que le foin de prairie, même si elle peut légèrement varier.
Si la valeur énergétique peut être équivalente entre un bon foin de prairie et un foin de luzerne, la teneur en MADC (protéines digestibles) est environ deux fois plus élevée pour la luzerne, et la teneur en calcium trois fois plus élevée qu’un foin de prairie.
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Attention toutefois, la qualité de la récolte est fondamentale. En effet, les protéines sont fragiles et se concentrent dans les feuilles de luzerne qui peuvent tomber avec le vent.
Dans ces cas-là, seule la tige persiste et un « mauvais » foin de luzerne peut alors contenir moins de protéines qu’un bon foin de prairie.
La richesse en protéine de la luzerne provient d’une particularité : la plante vit en symbiose avec des bactéries capables de fixer l’azote atmosphérique. La plante dispose ainsi de larges ressources pour produire des protéines, contrairement aux graminées dont l’apport en azote dépend exclusivement du sol.
Luzerne et protéines pour chevaux: attention aux excès !
Le cheval n’est pas conçu pour assimiler de trop grandes quantités de protéines. En cas d’excès, ces dernières seront évacuées sous forme de déchets dans les urines, notamment en produisant de l’ammoniac. Ce dernier, très irritant, peut provoquer des troubles respiratoires s’il s’accumule dans la litière et qu’il est inhalé par le cheval.
Pour autant, les effets et origines des excès protéiques sont mal documentés dans la littérature mais on sait en revanche que les excès de fructanes et de carbohydrates (provenant des sucres) sont davantage préjudiciables pour la santé digestive du cheval, avec l’apparition de dysbiose, de fermentations excessives, l’apparition d’ulcères gastriques et au niveau du colon : des diarrhées et des coliques.
Il ne faut donc pas diaboliser la luzerne, qui elle, contient très peu de sucres et d’amidon.
Luzerne et calcium : attention à l’équilibre de la ration !
Le calcium est un minéral indispensable et dont l’équilibre dans la ration est tout aussi fondamental.
Les carences sont préjudiciables pour la santé osseuse et articulaire, mais les excès ne sont pas sans risque non plus.
Un excès de calcium peut empêcher l’assimilation d’oligo-éléments comme le manganèse, le zinc, le fer et le cuivre, si le rapport phosphocalcique (Ca/P) est supérieur à 3. L’optimum étant qu’il se situe autour entre 1.5 et 2.
Il est déconseillé de remplacer à 100% le foin de prairie par du foin de luzerne pour éviter les excès calciques et protéiques.
Mais le foin de luzerne peut tout à fait remplacer une partie du foin de prairie en veillant à l’équilibre de la ration et en corrigeant avec un CMV au besoin
La luzerne : un effet bénéfique sur le système digestif du cheval ?
La luzerne est souvent mise en avant pour son fort pouvoir tampon en raison de sa richesse en protéines et en calcium, mais cette vertu est parfois controversée dans les études.
Elle pourrait également avoir un effet bénéfique sur la flore digestive et contribuer à une bonne santé digestive du cheval.
Dans une étude menée entre 2015 et 2016 par l’équipe de Lab to field, et portant sur l’effet de la luzerne sur l’écosystème gastrique du cheval, les auteurs ont étudié l’évolution du microbiote après ingestion d’un repas d’orge et de granulés de luzerne, ou d’orge et de tourteau de tournesol.
Ils ont observé que, même si la consommation d’amidon était équivalente dans les deux régimes, « les bactéries du contenu gastrique se développaient moins rapidement lorsque la luzerne était distribuée ».
Dans une autre étude menée en 2018-2019, les mêmes auteurs ont conclu que « les protéines de la luzerne n’étaient pas dangereuses pour le cheval mais surtout qu’elles garantissaient avec le calcium un pouvoir tampon très fort, ce qui limitait les acidoses digestives ».
Cela ferait de la luzerne un allié pour les chevaux souffrant d’ulcères gastriques, néanmoins d’autres études sont nécessaires pour confirmer tous ces points.
BILAN : la luzerne, avantages et inconvénients pour le cheval
C’est un très bon aliment, en fonction de ce que l’on recherche, mais à manier avec parcimonie et en ayant une vraie connaissance de la nutrition équine pour éviter des catastrophes dans la ration, et jamais comme unique source de fourrage !
- Riche en protéines et acides aminés de très bonne qualité
- Contient des enzymes favorisant l’assimilation des protéines, lipides et glucides
- Riche en calcium, béta-carotène, chlorophylle, vitamines et minéraux
- Fort pouvoir tampon
- Contribue à la détoxification de l’organisme du cheval
- Non adaptée pour des chevaux sans activité (richesse en protéine, calcium, etc..)
- Sa richesse en calcium peut déséquilibrer la ration si on n’y prête pas attention,
- Pas adaptée pour poulains et chevaux en croissance
- Possible formation d’entérolithe dans les intestins chez certains chevaux
- Ne peut pas se subsituer à 100% aux fourrages classiques
